. léon de st-hilaire

De Saint-Hilaire, Léon.
" A la lumière de nos amours
Comme un mégot sur du velours
En cendres au fond dun cendrier
Il faudra bien mourir. "

nom(s) ► de saint-hilaire. prénom(s) ► léon. âge ► vingt cinq ans. date et lieu de naissance ► 04 december. statut social ► l'esprit occupé. trait(s) de caractère ► calme, indocile, emporté, sociable, fidèle, têtu, rêveur, désillusionné, violent, vandale, menteur, intelligent, stratège, sensible, poète, misogyne, addictif, sombre, pessimiste, écolo. groupe ►Green is fashion

▹ MAKE A MEMORY.

→ PARAIT QU'IL FUME...
Il le regarde avec admiration. Ses joues bouffies, mal rasées, ses cheveux graissés par quelques substances chimiques, sa canine grisonnante, tout n'est que perfection. Sur ses épais genoux, il est obligé de lever les yeux pour rencontrer son regard dur et chaud. Un peu pataud, un peu gauche, son père lui sourit, pose sa grosse main sur sa frêle épaule. Il sent son maigre corps se tasser. Béat, il sourit. L'homme lui chuchote quelque chose à l'oreille. Discrètement, il jète un œil dans la cuisine. Rien ni personne à part l'odeur des pommes au four. Plongeant ses doigts de géant dans la poche de son jean, il ressort aussitôt sa boite à tabac. Une boite qui a longtemps intrigué le petit garçon.
- Voilà ce qu'il te faut pour faire de toi un homme.
Il chuchote encore, conscient de sa mauvaise éducation. Un cliquetis et la boite s'ouvre. Le parfum du tabac. Ils s'en délectent. Dans sa chemise cette fois, il met à jour quelques feuilles fines et translucides. Dans l'une, il dépose précautionneusement le tabac, tasse et roule la cigarette. Un dernier coup d'œil derrière lui et il allume le bâton entre ses lèvres. Au lieu de plisser son nez, de lui donner la nausée, le petit en inspire longuement la fumée. Ses yeux rivés sa bouche, ses lèvres pincées, sa curiosité laisse place à l'envie. Il n'ose pas demander. Heureusement, on la lui tend.
- Aspire et bloque.
Il s'exécute, se retient à peine de tousser. Les yeux humides, il aspire à nouveau.

→ PARAIT QU'IL BOIT...
Paraît qu'il boit
Le verre au bord des lèvres. Il le penche. Le rhum, son arôme et ses réminiscences, coulent dans sa gorge. Prompt à lécher la dernière goutte, il est retenu par un horrible cri. Détourné de sa délectation, il se retourne vers la porte du bar. Dans l'embrasure se découpe un corps filiforme, un peu voûté par l'âge.
- Léon ! Répète t-elle avec fureur.
Elle s'emporte et, telle une tempête, tourbillonne jusqu'à lui. Son pas léger ne laisse rien entendre de sa venue. Elle frappe. Là, juste sur sa nuque et lui ordonne de rentrer. Sa voix faiblarde, tremblotante, est en résonance avec son gabarit. En apprenant la nouvelle de la bouche de son horrible voisine, elle a foncé sans prendre le temps de s'habiller. Les épaules nues, vêtue d'une simple petite robe, elle fait peine à voir avec ses cheveux en désordre et son visage blafard. Voyant qu'il ne réagit pas, elle le saisit par le bras, tente de le tirer vers l'extérieur. Peine perdue. L'âge n'a pas fait perdre la tendresse sur le visage de sa chair, de son sang mais l'a rendu plus grand, trapu et lourd. D'un geste brusque, la mine dégoûté, il récupère son bras. Le choc la déséquilibre. Elle bascule et chute. L'assemblée -bien que restreinte- passe de l'amusement à la stupéfaction.
- Dégage.

→ PARAIT QU'IL... sait jongler, boit trop de café, s'est nourrit de bonbons pendant une semaine, dort très peu, est toujours mal rasé, s'endort au cinéma, dort nu, fait du stop/pouce pour se déplacer, aime taquiner, n'a pas fait d'études, ne travaille pas, vis sur le dos des autres, exècre le système politique de son pays, rêve d'idéaux et de grands horizons.

▹ WE WERE BORN TO DIE.

Ils s'alignent enfin. Ses désirs semblent avoir atteint le maire. La décision prise, il exulte. Intérieurement, comme toujours quand il s'agit de sentiment. Lui, délesté des attaches telle que la voiture, ne comptant que sur ses pieds et la ville maintenant qui le prend comme exemple : véritable baume au cœur. Parfois, quand la fatigue lui rappèle les limites de son corps, il regrette les autostoppeurs, les rencontres qu'une telle pratique lui permettait. Il lui manque parfois l'odeur étonnamment délicieuse de l'essence mais la nostalgie ne l'emportera pas sur ses rêves de voir le monde revenir aux choses primaires. Pour l'occasion, il s'est acheté un vélo. D'occasion, payé uniquement avec le labeur de ses mains, de sa tête. A la réflexion, seuls les bars enfumés lui manquent. La déprime est plus difficilement à berner dans des lieux conviviaux, chaleureux. On y préfère les échanges amicaux, les grandes déclarations. Où s'épancher et étancher sa soif d'oubli ?

▹ SOMEBODY THAT I USED TO KNOW.

Pouce tendu, il se traine sur le bord de route. Sa semelle, de temps en temps, se plait à chuter contre une pierre qui, lentement, s'en va rouler plus loin. La monotonie du quotidien, la monotonie de son quotidien. Ce qu'il aime : errer. Il n'est pas bon pour agir, meilleur pour penser. Il idéalise la vie parcellée qu'est la sienne, fermement persuadé que le bonheur est bout de cette errance. Parfois, il croit pouvoir l'atteindre rien qu'en tendant les doigts, parfois, il ne croit rien. Morose, enfermé dans son pessimiste, il s'éteint. Comme aujourd'hui.
Une voiture est touchée par sa démarche presque titubante. On veut savoir qui se cache sous le mort errant. Elle se gare, à quelques mètres et, attend. Lui, ne se presse pas pour la rejoindre. Pire, assuré d'avoir le temps, il le prend. La cigarette dans sa main passe dans sa bouche. Par mimétisme, il l'allume, tire une première latte. A hauteur de la porte passager, il se courbe, mains dans les poches. Il ressemble au vagabond qu'il est.
- Vous allez où comme ça ?
- Comme quoi ?
Des deux cotés, le ton est impertinent, sec voire agressif. Tout commence par une agression. Il la toise, vaguement étonné qu'une demoiselle ose ainsi s'arrêter pour le prendre, prendre le risque de le voir s'amouracher de ses courbes et bondir sur le volant. Il est tenté.
- Bakersfield.
- Ce n'est pas sur ma route mais je peux vous rapprocher.
Il hausse les épaules comme si l'effort ne valait rien. Le 'merci' de circonstance se perd dans sa gorge. Il monte, s'installe. Avant même qu'elle redémarre, il prend soin d'ouvrir la fenêtre. Légèrement claustrophobe. Remplir l'habitacle de fumée ne l'aurait pas dérangé, pire, il en aurait trouvé satisfaction.
Tandis qu'elle se concentre sur la route, lui, se concentre sur elle. Son regard appuyé, lourd, exerce une pression suffisante pour la mettre mal à l'aise. Ses sourcils se plissent d'avantage et renforcent encore sa mine contrariée. Elle accélère elle qui, déjà, fonçait.
- Ça vous dérange ?
Il ironise, se moque même. Un sourire narquois vient retendre ses lèvres. Son insolence est poussée une heure durant. Une heure au terme de laquelle, la conductrice, lassée arrête subitement son véhicule. Elle se tétanise une seconde, mains agrippées sur le volant puis, descend. Derrière elle, la porte reste ouverte. Muette, elle tourne en rond. Elle est trop loin et trop souvent dos à lui pour qu'il puisse apercevoir l'expression de son visage de porcelaine. Lassé de la voir, il descend à son tour, marche à sa rencontre.